Le somptueux banquet des anarchistes
DAAU en concert aux Halles
Dance, flamenco, rock, dub. . . Quatre Anversois réinventent le boxon. Extraordinaire !
ls ont déboulé, il y a quatre ans à peine, sur la planète musicale comme des matous affamés. Quatre Anversois, à peine pubères. déjà imbibés. De lait, goulûment tété aux lourds seins de Mère Nature. De rhum latino. De whisky brinon. De Duvels flamandes. Et, surtout, de cocktails explosifs et clairement impurs musicalement, cela donne des rythmiques flamenco, reggae. rock. dance. une clarinette idezmer, un accordéon jazz contemporain, un violon manouche, un violoncelle blues ou chambriste.
Un beau bordel, quoi… Voire une bouillabaisse carrément irrésistible. Le quatuor était pourtant destiné à une trajectoire autrement plus classique. Les copains d’enfance — Han Stubbe à la clarinette. Buni Lenski au violon, son frère Simon au violoncelle et, initiateur du projet, Roel Van Camp à l’accordéon — se destinaienique. Les copains d’enfance — Han Stubbe à la clarinette. Buni Lenski au violon, son frère Simon au violoncelle et, initiateur du projet, Roel Van Camp à l’accordéon — se destinaient même à de grandes études, direction académie et Conservatoire.
Puis, un jour, après avoir tutoyé les partitions polyphoniques de Bach, Haendel et consorts, les beaux esprits ont viré sales kets. Et troqué leurs costumes endimanchés de bons petits serviteurs contre les fringues souillons de fulgurants bâtards. Quel gâchis, s’épouvantent quelques intégristes en liberté…
Trop doués, sans doute, pour être confinés à de simples rôles d’exécutants, les membres de Die Anarchistische Abenclunterhaltung (Le divertissement nocturne anarchiste) ont donc un jour décidé de tout envoyer bouler. Pour repartir sur de nouvelles bases. Et faire du neuf avec du vieux.
« We néed new animais », leur dernier album (Sony), part de ce constat. Ici, pas de fabula rasa, puisque les références sont précisément innombrables, mais au contraire l´audace folle de transcender chaque genre musical abordé pour en faire une pate noivelle, infidele et orgeilleuse, débarrasée de potentiels et inutiles complexes.
Jamaïque, Andalousie
Apres un passage remarqué, l’an dernier l’Ancienne Belgique, DAAU est de retour à Bruxelles avec deux concerts aux Halles de Schaerbeek. On retrouvera a leur coté Angélique Wilkie, ex-Zap Mama et magique interprète pour DAAU de superbes sub (sortese reggae jamaïcains, version brut, dont Dip´n Dodge, sur We need new animals. A leur coté encore, le remixeur Doktorolive, et surtoit les gitans Andalous de Alma Flamenca.
Rencontrés au moment de l’enregistrement de We need new animals, lors de jam a Ronda, dans le sud de l´Espagne, les Andalous viendront deux jours d’affilée à Bruxelles pour célébrer le dépucelage d’une flamboyante liaison avec DAAU (il y aura deux ou trois créations communes). Guitares, percussions et chant traditionnel: Alma Flamenca, c’est littéralement l’âme du flamenco. Un flamenco rafraîchi par la présence de son tout jeune chanteur (19 ans), considéré en Espagne comme la nouvelle voix du genre.
Les musiciens du groupe flamenco sont là pour confirmer l’extraordinaire curiosité de DAAU, décidément amateur de sensuels et saccadés contretemps. Et de surprenantes distorsions sonores, qui font par moments ressembler le violon de Buni à un banjo ou à une guitare folk, le violoncelle de Simon à une guitare basse ou une contre-basse carrée, et l’accordéon de Roel à un orgue électrique, tanguant entre l’énergie tremblante d’un Piazzolla défoncé et les gueules de bois d’un pantin déglingué.
Bientôt l’ordinateur
Ne parlons pas de la clarinette de Han, se jouant des étiquettes déposées (jazz, klezmer yiddish, traditionnel, musique de chambre) pour créer le son d’une xième dimension. Un peu a l´image du groupe.
D’un groupe désormais en marche vers de nouvelles énergie. Et déjà préoccupé, en anticipation du prochain album (l’année prochaine, si tout va bien), par l’intégration au sein du quatuor de techniques modernes comme le sampler ou l´ordinateur. A mi-chemin entre lavant garde et la tradition, DAAU est décidément un groupe inclassabe. Un groupe a aller découvrir, si ce n´est déja fait, toutes affaires cessantes.
Nicolas Crousse, Le Matin, 10/04/99